[ITW] Moundir : 'Qui aurait cru que je gagnerais un High Roller ?'
Par Général
dansDepuis son titre au dernier MPO, Moundir Zoughari a la tête dans les étoiles. Mais cela ne l'empêche pas de voir encore plus loin... Interview d'un WIP qui n'a jamais été aussi heureux de l'être.
Dix ans qu'il attendait ça. En remportant à la mi-mars le High Roller du Marrakech Poker Open, Moundir Zoughari a enfin décroché le titre majeur en live qu'il convoitait tant. Quelques jours après ce sacre, le plus joueur des WIP de Winamax est revenu sur son séjour marocain, sur la façon dont il a surmonté ses soucis de santé et bossé son jeu ces dernières années, ainsi que sur ses projets pour l'avenir. Avec un certain bracelet en ligne de mire...
Tu viens de rentrer de Marrakech [interview réalisée mardi 21 mars, NDLR], où tu as remporté le High Roller pour un peu plus de 54 000 €, avant de terminer runner-up du Monster Stack pour environ 14 000 € : quel est ton sentiment après cette petite semaine de folie ?
Je ne suis toujours pas descendu de mon nuage, la pression ne s’évapore pas. Je profite à fond de ces moments que j’attendais depuis dix ans en tant que joueur. Et il y a aussi tout cet engouement pour ma perf'... Au poker, je suis désormais un peu plus “crédible”. Ces cinq jours ont été un rêve pour un pur joueur amateur et passionné comme moi. J’avais déjà gagné un Side Event de la Grande Finale WiPT en 2012, mais c’était tout nouveau, je n’étais pas encore engagé chez Wina. Je n’avais pas encore mon investissement actuel, quand aujourd'hui je représente une room qui me suis depuis longtemps dans l’image du poker populaire et amateur. Et j'étudie le jeu. Mon envie était de me démarquer des autres WIP, en décrochant le Graal, c'est-à-dire ce titre majeur. Qui aurait cru que je gagnerais un High Roller avec un field aussi relevé comme à Marrakech, où je suis toujours à l'aise ? C’est un rêve.
Quel est ton sentiment concernant la partition que tu as jouée dans ce High Roller ?
Honnêtement, c’est la première fois que je me suis senti vraiment prêt à en découdre durant deux jours. Je n’ai pas eu de complexe d’infériorité, bien au contraire. J’étais conscient de mon niveau, je savais qu’en face ils étaient plus forts que moi, et qu'il fallait optimiser sur le peu d'erreurs de mes adversaires. Il n’y avait que là-dessus que je pouvais gagner. C’est certain, j’ai passé un step supplémentaire sur ce tournoi.
Tu soutiens avoir beaucoup travaillé ton jeu ces dix dernières années. Comment ?
Il y a eu mon premier coach Guillaume Jenner. Il y a aussi le volume de jeu sur Internet, beaucoup de vidéos, des échanges avec des joueurs comme Jimmy Guerrero par exemple, toutes les discussions sur lesquelles je prenais des notes pour ensuite les mettre en pratique. J’ai aussi beaucoup travaillé sur les tells, je mise beaucoup là-dessus, c’est une arme absolue. L’accumulation de tout cela fait qu’aujourd’hui cette lumière bleue arrive sur moi.
Tu expliquais avoir coupé tous les réseaux sociaux pendant ce deep run... Pourquoi ?
Oui, c’était la première fois, j’étais dans ma bulle. Dans ce genre de tournoi où les mecs sont tellement forts, il ne faut pas s’éparpiller. Il faut enregistrer leurs comportements, tout noter. Les gens ont trop tendance à rester sur les réseaux… Dans un tournoi comme celui-là, je renseigne juste mon stack, et si je passe le Day 1 ou le Day 2. Et quand j’ai rallumé mon tel, je n’avais jamais eu autant de messages, même pour une émission de télé. Mon téléphone était comme un sapin de Noël. J’ai aussi eu droit à une interview de Pokernews.com, pour moi c’est énorme. Je suis content, et j’espère que Winamax est fier de moi.
Cette victoire sonne-t-elle aussi comme une renaissance pour toi, après tes problèmes de santé durant la pandémie ?
Quand on frôle la mort, et qu’on vit une convalescence dans une grande souffrance, forcément ça galvanise. La vie qu’on a laissée, on la reprend et on l’améliore. Cela aide aussi à relativiser quand on prend un bad beat… Lorsque je suis tombé malade, Wina est resté fidèle. Rien que pour ça, je me battrai pour eux jusqu’à mon dernier souffle, pour représenter ce W rouge de la meilleure des manières. Comme je le dis souvent, si l’aventure avec Winamax devait s’arrêter, j’arrêterais le poker. Je suis intransférable, quel que soit le tarif.
Après ce titre tant attendu, te sens-tu désormais libéré d’un poids ?
C’est plus qu’une satisfaction, c’est une libération. Ce n’est pas un poids que je portais, c’était une évidence pour moi. C’est une fierté accomplie, par le travail, l’attente de ces dix ans de dur labeur, à enchaîner les tournois populaires, dans les clubs, en amateur. C'est le résultat de beaucoup d’abnégation, d’avoir un jour sa chance et de la saisir. C’est ce qui me caractérise. La chance arrive car il y a du travail et de la discipline. Le poker, ce n’est pas du loto. Et les High Rollers, ce sont de très gros joueurs, c’est en les affrontant que tu deviens meilleur.
Vas-tu tout de même t'autoriser un peu de relâche pour fêter ça ?
Le ramadan a commencé, une période durant laquelle je ne ferai pas de tournois en live. Et comme j’ai pris un peu de poids, je vais m’entraîner dur physiquement pour être prêt pour le SISMIX et Vegas. Je vais travailler mon jeu, je vais garder ce flux en moi. L’idée pour Vegas est de jouer le Main Event, le 3 000 $ 6-Max et un autre tournoi. Je suis reconnaissant de la chance que j’ai, et je ne la lâcherai plus. Mais je reste conscient de mon niveau, il ne faut pas avoir la folie des grandeurs, ce que je n’ai jamais eu de toute façon.
Le bracelet WSOP, c’est désormais un vrai objectif pour toi ?
C’est indéniable. Je veux le bracelet. Et je sais qu’un jour j’en aurai un, même s’il y a beaucoup d’appelés pour peu d’élus. Maintenant que j’ai eu ce titre “suprême”, comme je l’appelle, je vais me focaliser sur les WSOP. Il faut mettre à profit ce qui se passe actuellement.
On te voit sur de nombreuses étapes du Winamax Poker Tour chaque année. Qu’est-ce qui te pousse à te déplacer autant, même pour jouer des freerolls ?
Je suis conscient de la chance que j’ai. C'est un peu ce que dit pas mal de monde, mais je n’oublie pas d’où je viens, qui je suis, et ce qui m’a permis d’en arriver là. Je resterai toujours un amateur passionné, et faire des freerolls, aller dans un club quelque part en France, faire de la prévention... Je n’arrêterai pas. C’est ce qui m’a permis d’avancer. Je ne négocie jamais avec moi-même. Je ne change pas ce qui me permet de réussir. Mais au final je ne me déplace pas tant que ça, je dois faire au maximum six tournois par an, quelques festivals. Je n’ai pas joué l’EPT à Paris, j'ai fait Marrakech, puis j'irai au SISMIX et sur les WSOP-Circuit à Cannes...
Passer pro un jour, cela pourrait-il être un but pour toi ?
Honnêtement, là si tu me demandes si je veux être joueur pro, je te dis non. Après, si des choses changent, on s’assoit et on discute. C’est sûr que si Wina me le proposait, il faudrait peser le pour et le contre. Il y a déjà eu des personnalités sponsorisées, comme Vikash Dhorasoo, Estelle Denis chez Barrière… Mais pour l’instant, je suis bien en place, et je trouve que c’est un peu prématuré. Je n’y pense même pas : pour moi c’est une illusion, un vrai rêve.
Bientôt, une saison hors-série de Dans La Tête d'un Pro, intitulée Dans la Tête de Moundir, sera diffusée. On te verra en action au WPO Bratislava... Ça représente quoi pour toi ?
C’est le Graal, une consécration. J'ai été patient : c’est long, dix ans. C’est tellement incroyable que les gens puissent voir comment je joue. Faire les commentaires en studio, c’était génial. Un scoop ? Je peux juste dire que ce sera de longs épisodes… Cela sortira rapidement !
Propos recueillis par Rootsah
Crédit photo créa : Mounir Mahroug - Casino Es Saadi
Vous pouvez aussi retrouver Moundir dans le Culture Pok du mercredi 22 mars
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