Hippies, tipis, et herbes folles
dans(Résumé de l’épisode précédent : Ludovic est invité au WPT Shooting Stars en Californie, Ludovic se ballade à San Francisco, Ludovic fait la fête, Ludovic tombe malade, Ludovic joue un tournoi de poker, Ludovic est de plus en plus malade, Ludovic décide de rester un peu en Californie…)
Le tournoi au Bay 101 étant terminé pour moi, je décide de retourner quelques jours sur San Francisco avant de me diriger vers la dernière étape de la boucle Californienne du World Poker Tour : le Rolling Thunder.
Ayant deux jours à tuer avant son retour en Europe, mon ami Fabrice Soulier décide de se joindre à moi, et en deux temps trois mouvements un hôtel est réservé, et un taxi nous dépose à Union Square, en plein centre-ville quoi. Il est quatorze heures, le temps est radieux, comme tous les jours en Californie, idéal pour une balade. Première étape : Lombard Street, l’iconique rue en zig-zag de Frisco, en haut de laquelle on peut admirer une vue incroyable de la ville, comme nous sommes de touristes nous payons vingt dollars pour y monter en Cable Car, histoire de pouvoir un jour le raconter à nos petits-enfants.
On continue notre ballade sur cette espèce de colline perchée au milieu de la ville avant de prendre un taxi pour le Golden Gate Park et, de là, rejoindre la plage à pied. Il est déjà dix-huit heures et le soleil est sur le point de se coucher sur la gigantesque étendue de sable, ici les gens viennent boire des coups, jouer de la guitare, jongler ou fumer des pétards. Il y a aussi des brasiers allumés tous les cinquante mètres, la population est un mélange de jeunes, de hippies et de junkies, une personne pouvant appartenir aux trois catégories. L’endroit est cool et j’aimerais bien voir à quoi ça ressemble un peu plus tard dans la nuit mais un festin nous attend…
Durant le trajet vers Frisco, Fabrice m’avait vanté les mérites d’une alimentation végétarienne agrémentée d’un chouia de poisson, le tube digestif de l’homme étant paraît-il trop long pour nous autoriser à être de vrais carnivores. Moi, je viens du sud de la France, j’ai été élevé à grand coups de charcuterie, de viandes et de volailles, je suis donc curieux d’essayer. Histoire de me prouver que le végétarisme n’est pas forcément affaire de mâchouiller des feuilles et avaler des graines mais peut être aussi un régal pour les papilles, Fabrice m’emmène dans l’établissement le plus réputé de San Francisco.
Bienvenue au Millenium ! Le chef y est en place depuis plus de vingt ans et l’endroit est pris d’assaut par le bottin mondain local. Dans chaque recoin de la sombre pièce, on peut y entendre les pontes des starup locales causer user aquisition, conversion rate, pivot, lean strategy. Je commande un verre de vin en parcourant la carte. Les intitulés des délices herbivores sont plus déconcertants les uns que les autres, je ne comprends rien et c’est donc au hasard que je choisirai une Seared Buckwheat Polenta et un Blue Corn Masa Tamale. Excellent choice, répond le hipster qui prend la commande, Fabrice opte lui pour un Black Rice Cake et une entrée dont j’ai oublié le nom. Je me ressers un verre de vin en me disant que cet endroit calme et sombre est idéal pour les discrets rendez-vous d’affaires, j’imagine Evan Williams dînant avec Fred Wilson et Bijan Sabet, complotant en faveur de l’éviction de Jack Dorsey.
Verdict du repas ? Je n’ai que très rarement su exactement ce que j’étais en train de manger… Mais c’était excellent, si bien que j’ai décidé de poursuivre l’expérience végétarienne aussi longtemps que possible, j’ai fait quelques rechutes récemment mais globalement je tiens le bon bout, mon long tube digestif m’en remercie surement.
La soirée s’est poursuivie en compagnie d’autres joueurs eux aussi éliminés de Bay 101 et en transit a Frisco avant le prochain tournoi, nous sommes allés voir Blasterjaxx en live dans un club assez ridicule, avec sa ségrégation entre le premier étage réservé aux plus de 21 ans et au bar fourni en alcool, alors qu’en bas ils ont entre 18 et 21 et doivent donc se contenter de Coca. Sans surprise, la musique était dans l’ensemble assez naze, certes les Américains ont récemment développé un goût prononcé pour la musique électronique, mais pas pour la bonne musique électronique, si vous voulez mon avis. Bref, à 1h59 tous les serveurs se sont mis à courir pour enlever des tables verres et bouteilles, la loi c’est la loi, pas d’alcool après deux heures du mat’ et on ne rigole pas avec ça. Du coup, je suis officiellement rentré me coucher pour profiter de la journée du lendemain.

Après avoir déjeuné et dit au revoir à Fabrice, je me suis dirigé en solo vers le seul spot à touriste que je n’avais pas encore visité : le quartier hippie d’Haight & Ashbury. Plutôt une très longue rue qu’un quartier, en fait, remplie de magasins de fringues vintage, de bijoux, de falafels végétariens (ça tombe bien) et de restaurants. La population est un éclectique mélange de touristes, de jeunes hippies, et de vieux hippies qui auraient dû ralentir sur les drogues il y a une vingtaine d’années. J’ai aussi eu le plaisir de croiser un jeune homme se baladant vêtu uniquement d’un sac à main et d’un espèce de pompon (je vous laisse deviner ou était le pompon). J’ai ensuite été rejoint par Nicolas Cardyn et son pote Athanasios, et nous avons décidé d’aller nous poser dans Dolores Park – il paraît que le vendredi soir c’est LE spot où passer la fin d’après-midi.
Nous avons vite compris pourquoi ! La vue de la ville est imprenable, tous les jeunes viennent se poser ici pour commencer la soirée directement dans l’herbe ou un peu en contrebas du parc dans une petite brasserie qui produit une bière locale très sympathique. L’ambiance est très relax en début de soirée, tout le monde discute avec tout le monde, les chanceux s’installent sur les roof terraces, les moins riches improvisent un barbecue à même le trottoir. Nico entend parler d’une soirée ou se produit un certain DJ Tennis, alors on décide d’aller voir ce qui s’y passe vu que c’est notre dernière soirée dans la ville.
La soirée est super, la musique géniale, le club suinte et nos corps aussi, chacun rencontre un peu l’amour et rentre se coucher assez tôt (officiellement du moins). Au réveil Athanasios et moi disons au revoir à Nicolas qui reste sur San Francisco et montons dans une Mustang de location pour nous envoyer les deux heures de trajet vers la Vallée du Tonnerre.
Le casino de Thunder Valley est immense, et se situe au dans une réserve indienne perdue à une trentaine de kilomètres au Nord de Sacramento. Voilà a peu près tout ce que je savais de ce casino avant de m’y rendre, la bonne nouvelle (ou plutôt la mauvaise) c’est qu’il n’y avait absolument rien d’autre à savoir. Place donc à la partie « poker » de ce récit, rassurez-vous elle sera très courte.
Le tournoi est un 3500$ avec deux Day 1 et possibilité de Re-Entry, la salle du tournoi est située au fond du gigantesque casino. Je décide de jouer le Day 1A, histoire de disposer d’une seconde chance en cas de malheur. Les joueurs du tournoi sont non seulement moins nombreux qu’à San Jose mais aussi bien meilleurs. Il n’y a presque aucun joueur local, ce qui ne me surprend pas vu qu’il n’y a pratiquement aucune maison (ni aucun tipi d’ailleurs) aux alentours du casino.
Ma première table est donc assez difficile. Je décide de jouer serré, et au bout de deux niveaux trouve une paire de Dames UTG. Je relance, suis payé en position, et le flop tombe A




Direction le bar pour boire un verre, je tombe sur Matt Savage qui m’informe que malgré ma qualif à l’issue du Day 1A je peux tout de même jouer le Day 1B pour tenter de monter plus de jetons. En cas d’élimination, je pourrai jouer le Day 2 avec mon stack du Day 1A. J’hésite et décide de laisser la nuit me porter conseil.
Au réveil mes idées sont claires : je ne suis pas venu dans une réserve Indienne paumée pour ne pas tenter le deep run. J’estime que mes 10,000 du Day 1A ont trop peu de valeur : a chip and a chair, d’accord, mais un big stack et un fauteuil canapé, c’est bien mieux.
J’entame le Day 1AB au quatrième niveau. Blindes 150/300. Première main reçue, je jette, deuxième main, A





Le lendemain, je me pointe au Day 2 avec mes 10,000 du Day 1A, c’est toujours ça me dis-je. Sauf que je ne tiendrai pas plus de trois mains, mon As-3 restant derrière face à As-4, heureusement il était assez tôt pour que je puisse aller fêter la St-Patrick à Sacramento, avant de sauter dans un avion le lendemain, direction… Sydney ! Mais ça, c’est une autre histoire. A bientôt.