[Blog] Reculer pour mieux sauter
Par Life Style
dansSalut à tous ! Commençons ce blog avec les bonnes manières : je vous souhaite à toutes et à tous une excellente année 2021 ! Mes meilleurs vœux évidemment, mais surtout une bonne santé à vous et vos proches.
Quelle année 2020 ce fut mes aïeux ! Tant de choses ont changé dans notre manière de vivre, d’appréhender le monde ainsi que notre relation à autrui et à nous-mêmes. Je ne pense pas me tromper en disant que cela a été difficile pour beaucoup d’entre nous, entre les confinements et une certaine précarité de l’emploi. J’en profite d’ailleurs pour glisser une pensée particulière à tous les croupiers, journalistes et autres travailleurs du poker qui se retrouvent dans en situation précaire et ne peuvent que subir et patienter. Bon courage à vous si vous lisez ceci !
Dans ce billet de blog, j’aimerai livrer avec un peu de recul mon ressenti sur cette année avec une honnêteté qui sera, je l’espère, appréciée. Ensuite, j’en ferai une analyse afin d’en tirer les enseignements pour finir sur mes objectifs, concis, pour cette nouvelle année.
Sans pays fixe
Personnellement, ce fut une année très complexe à gérer à plus ou moins tous les points de vue. 2020 c’est l’année où j’ai vécu dans 3 pays différents. Tout d’abord au Royaume-Uni, où je vivais depuis quatre ans déjà, puis j’ai déménagé au Canada début février dans l’objectif d’y vivre, sans penser le moins du monde que mes plans allaient être contrecarrés par ce fameux Covid-19. Un mois plus tard, je partais en voyage pour le Japon (photo ci-dessous) mais ne je ne pus rentrer au Canada car mon vol arrivait le jour même du blocage des frontières pour les non-résidents. N’y étant resté que quatre semaines à peine, je ne disposais que d’un visa touristique.
Je dus alors prendre un avion pour Londres afin de retourner dans une coloc’ qui m’a généreusement hébergé pendant près de 2 mois et demi. Après un été passé en France, il fallait bien repartir quelque part car les Winamax Series et les WSOP Online allaient commencer en même temps. J’ai d’abord pensé à Vienne, mais c’est sur Budapest que s’est jeté mon dévolu. Au moment de taper ces lignes, cela fait donc près de quatre mois que j’y vis.
Au niveau du poker, je n’ai pas atteint les résultats financiers escomptés. Disons-le : l’ensemble est même plutôt décevant, malgré de grosses opportunités qui ne se sont pas déroulées comme espéré.
Vous l’avez compris, en 2020, j’ai dû constamment gérer l’imprévisible. Où aurais-je le droit d’aller ? Pour combien de temps ? Pourrais-je jouer au poker, c'est-à-dire, simplement faire mon travail ? Trouverais-je facilement un appartement et une connexion internet fiable ? J’étais sans cesse dans l’incertitude la plus complète, ce qui ajoutait bien sûr une dose de stress pas vraiment optimale dans une optique de performance lors des (nombreuses) périodes de festivals online.
J’ai ressenti énormément de frustrations durant cette année, surtout lorsque j’ai dû rentrer à Londres avec seulement mon sac de voyage et rien sur moi pour travailler. Toutes mes affaires étant restées au Canada, j’ai dû racheter tout le nécessaire (ordinateur, écrans, souris, etc..) mais aussi payer un loyer tous les mois jusqu’en septembre pour un appartement où je ne pouvais pas mettre les pieds. En seulement quelques semaines, j’avais trouvé un excellent rythme de vie montréalais, que j’ai dû abandonner en même temps que ma copine que je n’ai pas pu voir pendant quasiment quatre mois. Mais bon, cela fait aussi partie des imprévus de la vie.
Le doute en moi s’est immiscé
Vous vous en doutez, tout cela a des conséquences quand on est joueur de poker. Il est très facile de sombrer dans une spirale de négativité et de pessimisme. Je dois avouer, je n’y ai pas coupé, et cela s’est ressenti sur mes performances. J’avais du mal à me projeter dans l’avenir, du mal à imaginer quelque chose de plausible ne serait-ce que pour l’année à venir, du mal à créer une motivation par rapport à de quelconques objectifs.
En plus de ces frustrations se sont ajoutées celles aux tables de poker, notamment d’avril à août, cinq mois particulièrement difficiles. Je commençais à ressentir un trop plein d'émotions négatives qui ont alimenté toutes sortes de doutes : suis-je assez bon pour jouer si cher ? Si je ne gagne pas, c’est que que je fais forcément quelque chose de mal ; est-ce que je ne serai pas en train de jouer au-dessus de mes limites ? Ai-je de gros leaks mentaux et/ou techniques qui m’empêchent de performer ? Est-ce juste la variance ?
Quand on n’a pas l’esprit libre, cela se ressent directement aux tables. J’ai ressenti assez souvent un manque de patience dans mes sessions qui induit de grosses attentes et donc un besoin de gagner fort et vite. Or, pour jouer du mieux possible, il faut éviter d’avoir des attentes en termes de résultats mais se concentrer plutôt sur le processus de progression (travailler par exemple sur les spots de c-bet avec hauteur As, ou de défense big blind contre bouton) car c’est quelque chose qui est sous notre contrôle direct. Les résultats, non.
Après des sessions chères qui ne s’étaient pas bien passées, il m’arrivait assez souvent de me remémorer les plus mauvais moments de ma carrière, au point de me demander si cette dernière n’avait pas été composée uniquement de ça. Je me comparais aux autres, j’étais envieux de ceux qui avaient tant de résultats alors que moi je galérais à faire une session positive. Ce jeu est éprouvant pour l’esprit, encore plus quand on joue les parties les plus chères et les plus relevées du monde. C’est pourquoi il est important de prendre soin de sa santé mentale lors de ces périodes.
J’ai tout de même eu une grande chance, qui est d’avoir pratiqué la méditation pendant pas mal d’années, ce qui m’a beaucoup aidé dans ces moments-là. Toutes ces idées noires, je les observais et décidais simplement de ne pas leur donner de crédit. Il y avait une grosse différence avec les autres périodes de doute que j’ai pu traverser : ici, j’étais pleinement conscient de ma façon de raisonner qui partait dans tous les sens mais ne laissais pas ces pensées me diriger. Évidemment, c’est toujours quelque chose qui va peser dans la vie quotidienne, mais ces émotions négatives ne dicteront pas ma conduite. J’apprends à cohabiter avec elles et petit à petit, elles s’estomperont.
Prenez tout cela, saupoudrez-le d’un zeste de confinement, que j’ai passé seul dans mon appart’ 95% du temps, et cela n’a pas été la meilleure période de ma carrière, je peux le concéder aisément. Comme dit, je manquais aussi de motivation. “À quoi bon travailler comme je le fais si je n'en vois pas les résultats ?,” me disais-je oubliant alors le plus important : devenir meilleur. J’étais souvent dans un grand état de fatigue, proche du burn-out, si bien que j’ai dû prendre pas mal de jours off qui ont pas mal freiné le travail technique que j’avais pour objectif de faire avant 2021. Mais comme je le disais plus haut, il est parfois plus important de souffler pour repartir plutôt que de foncer tête baissée dans le mur.
Il m’a fallu apprendre à gérer la souffrance et à l’utiliser à des fins positives. Cela m’a permis de comprendre que ces périodes difficiles sont d’énormes vecteurs de progression personnelle. Elles nous obligent à travailler la résilience, la force mentale, nous poussent à donner le meilleur de nous-même tous les jours pour réussir et exploiter notre plein potentiel.
Sans toutes ces étapes que j’ai dû traverser dans ma vie, je ne serais pas devenu la personne que je suis aujourd’hui. C’est au final elles qui m’ont construit. Mais forcément, quand on se trouve au cœur de ces périodes-là, on les déteste. La seule chose que l’on veut c’est en sortir et c’est simplement et bizarrement humain.
Rester positif dans nos têtes
Après avoir posé ce constat, que faire maintenant ? Comment sortir de cette spirale négative ? Je pense que la première étape était de reconnaître tout ce processus mis en place à l’intérieur de moi. Ensuite, essayer de dialoguer avec mes émotions, comprendre pourquoi elles sont si fortes et ce qu’elles veulent me faire comprendre. Ce n’est pas quelque chose de l’extérieur, c’est moi-même qui les crée et elles doivent donc avoir une utilité. Comme la peur qui peut servir à nous sauver d’un danger.
Concernant les doutes, le plus simple est de vérifier si chacun d’eux est fondé ou pas. Grâce aux trackers par exemple, en allant étudier mes stats, mes evbb/100. Mais aussi en échangeant avec d’autres professionnels et demander leur expertise sur certaines mains, sur mon jeu. Pour les résultats, j’analyse par différents buy-ins, je filtre des parties et vois là où sont mes meilleurs jeux et ceux où je perds de l’argent. Je peux aussi utiliser les calculateurs de variance et voir si je suis vraiment en train de jouer trop cher, ou si c’est bel et bien la variance. Par exemple, aux plus hautes limites, là où notre ROI est plus bas, il est fréquent et normal de voir des downswings de 200-300 buy-ins sur 1500-2000 MTT. Je dois essayer autant que possible d’injecter de la certitude sur mes capacités réelles et les domaines où je dois progresser. Cela permet de prendre aussi du recul sur les résultats live.
Dans chaque situation, il y a toujours du positif à tirer et il est alors hyper important que je focalise tous les jours mon attention afin d’avoir une “double vue”. C'est-à-dire d’en reconnaître les choses négatives, certes, mais aussi de toujours faire l’effort de chercher les éléments positifs.
Prenons le Covid à titre d’exemple. On pourrait se dire qu’il n’y a rien de positif à en retirer mais on observe pourtant une réduction de 7% des émissions de gaz à effet de serre dans le monde, une baisse flagrante du nombre de grippes et gastros, etc. Grâce à ça, je peux prendre du recul sur les choses et éviter de retomber dans une vision biaisée de ma propre situation.
Situation qui d’ailleurs, d’un point de vue objectif, est excellente. J’ai tendance à oublier toutes les choses positives de ma vie, la chance que j’ai eue, mais aussi tout ce que j’ai déjà pu accomplir dans le poker. Pendant trois ans, j’ai représenté Winamax en tant que joueur sponso, un statut que je n’aurais jamais espéré atteindre à mes débuts. Rien que ça, ça compte ! Il faut que j’apprenne à développer et cultiver la gratitude que j’ai pour toutes les choses que j’ai pu faire et voir dans ma vie, les amis, d’être né dans le plus beau pays du monde, etc…
Ce que je vais décider de garder de mon année 2020, ce sont les choses positives que j’ai faites. J’ai fait mon plus gros volume en MTT depuis cinq ans, à l’époque où je grindais les midstakes, j’ai bossé sur beaucoup de sujets théoriques que je voulais faire, mais aussi développé pas mal de nouvelles lignes exploitantes. J’ai pu agrandir mon expérience et mes reads sur les regs de mes limites, apprendre de meilleurs moyens de travailler.
Hors des tables j’ai implémenté une routine de lecture qui m’a fait dévorer beaucoup de bons bouquins cette année, j’ai aussi appris à faire du bon pain au levain moi-même et même de bons croissants ! Quant à mon apprentissage du japonais je continue toujours à mon rythme, environ une heure par jour. Je commence enfin à avoir le niveau pour lire des mangas faciles (Dragon Ball, Yotsuba...) en comprenant les grosses lignes.
Et 2021 alors ?
2021 sera l’année des trois P. L’année où j'apprends à être Positif, quoi qu’il advienne d’avoir toujours le recul nécessaire pour prendre de bonnes décisions. Ce sera également l’année de la Patience. Me concentrer sur mon processus sera la grosse priorité, les résultats viendront d’eux-mêmes si celui-ci est bien effectué, c’est une certitude. Enfin, en 2021 je vais apprendre à Polir ma pierre, une pierre brute qui demande du travail afin d’en extraire le plein potentiel, qui demandera des efforts et des sacrifices. Après tout, ça fait des années que j’en fais et je ne suis pas prêt de me laisser abattre par cette année 2020.
Amis lecteurs, soyez forts, même au-dessus du plus gros des orages se trouve le plus beau des ciels bleus.
Prenez soin de vous,
Adrien
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